Job 7

Louis Segond 1910

1 Le sort de l'homme sur la terre est celui d'un soldat, Et ses jours sont ceux d'un mercenaire.2 Comme l'esclave soupire après l'ombre, Comme l'ouvrier attend son salaire,3 Ainsi j'ai pour partage des mois de douleur, J'ai pour mon lot des nuits de souffrance.4 Je me couche, et je dis: Quand me lèverai-je? quand finira la nuit? Et je suis rassasié d'agitations jusqu'au point du jour.5 Mon corps se couvre de vers et d'une croûte terreuse, Ma peau se crevasse et se dissout.6 Mes jours sont plus rapides que la navette du tisserand, Ils s'évanouissent: plus d'espérance!7 Souviens-toi que ma vie est un souffle! Mes yeux ne reverront pas le bonheur.8 L'oeil qui me regarde ne me regardera plus; Ton oeil me cherchera, et je ne serai plus.9 Comme la nuée se dissipe et s'en va, Celui qui descend au séjour des morts ne remontera pas;10 Il ne reviendra plus dans sa maison, Et le lieu qu'il habitait ne le connaîtra plus.11 C'est pourquoi je ne retiendrai point ma bouche, Je parlerai dans l'angoisse de mon coeur, Je me plaindrai dans l'amertume de mon âme.12 Suis-je une mer, ou un monstre marin, Pour que tu établisses des gardes autour de moi?13 Quand je dis: Mon lit me soulagera, Ma couche calmera mes douleurs,14 C'est alors que tu m'effraies par des songes, Que tu m'épouvantes par des visions.15 Ah! je voudrais être étranglé! Je voudrais la mort plutôt que ces os!16 Je les méprise!... je ne vivrai pas toujours... Laisse-moi, car ma vie n'est qu'un souffle.17 Qu'est-ce que l'homme, pour que tu en fasses tant de cas, Pour que tu daignes prendre garde à lui,18 Pour que tu le visites tous les matins, Pour que tu l'éprouves à tous les instants?19 Quand cesseras-tu d'avoir le regard sur moi? Quand me laisseras-tu le temps d'avaler ma salive?20 Si j'ai péché, qu'ai-je pu te faire, gardien des hommes? Pourquoi me mettre en butte à tes traits? Pourquoi me rendre à charge à moi-même?21 Que ne pardonnes-tu mon péché, Et que n'oublies-tu mon iniquité? Car je vais me coucher dans la poussière; Tu me chercheras, et je ne serai plus.

Job 7

La Bible du Semeur

1 Le sort de l’homme sur la terre ╵est celui d’un soldat et ses jours sont semblables ╵à ceux d’un mercenaire.2 Il est comme un esclave ╵qui soupire après l’ombre[1] et comme un ouvrier ╵qui attend son salaire.3 J’ai reçu en partage ╵des mois de déception, j’ai trouvé dans mon lot ╵des nuits de peine amère.4 Dès que je suis couché, je dis: ╵« Quand vais-je me lever? » Sitôt levé, je pense: ╵« Quand donc viendra le soir[2]? » Et, jusqu’au crépuscule, ╵je suis agité de douleurs.5 Mon corps est couvert de vermine ╵et de croûtes terreuses, ma peau s’est crevassée, ╵partout, mes plaies suppurent.6 Mes jours se sont enfuis ╵plus rapides que la navette ╵d’un tisserand habile. Ils tirent à leur fin ╵sans qu’il y ait d’espoir.7 Rappelle-toi, ô Dieu, ╵que ma vie n’est qu’un souffle et que jamais mes yeux ╵ne reverront plus le bonheur.8 Oui, l’œil qui me regarde ╵ne pourra plus me voir, tes yeux me chercheront ╵et j’aurai disparu.9 Tout comme une nuée ╵qui se dissipe et passe, l’homme va dans la tombe[3] ╵pour n’en plus remonter.10 Il ne reviendra plus ╵dans sa maison et sa demeure même ╵ne le reconnaît plus.11 C’est pourquoi je ne veux ╵plus réfréner ma langue, je parlerai ╵dans ma détresse, je me lamenterai ╵car mon cœur est amer.12 Suis-je donc une mer ╵ou un monstre marin pour que tu établisses ╵contre moi, une garde[4]? (Jb 3:8)13 Si je me dis: ╵« Mon lit m’apaisera, ma couche m’aidera ╵à porter ma douleur »,14 alors tu m’épouvantes ╵par d’affreux cauchemars et tu me terrifies ╵par des visions nocturnes.15 J’aimerais mieux être étranglé, la mort vaudrait bien mieux ╵que vivre dans ces os.16 Je suis plein de dégoût! ╵Je ne durerai pas toujours. Laisse-moi donc tranquille: ╵ma vie est si fragile.17 Qu’est-ce que l’homme, ╵pour que tu fasses ╵un si grand cas de lui, et pour que tu lui prêtes ╵une telle attention,18 pour que tu l’examines ╵matin après matin, et pour qu’à chaque instant ╵tu viennes l’éprouver?19 Quand détourneras-tu ╵enfin tes yeux de moi? Ne lâcheras-tu pas ╵un instant ton étreinte, ╵ne fût-ce que le temps ╵d’avaler ma salive?20 Et puis même si j’ai péché, ╵que t’ai-je fait, à toi, ╵censeur des hommes? Pourquoi donc m’as-tu pris pour cible? Suis-je devenu une charge[5]?21 Pourquoi ne veux-tu pas ╵pardonner mon offense et ne passes-tu pas ╵sur mon iniquité? Bientôt j’irai dormir ╵au sein de la poussière et tu me chercheras, ╵mais je ne serai plus.